Façade Île Seguin
Boulogne-Billancourt (92)
Définition et conception de la « façade enveloppe » de l’Île Seguin
Renouveler l’image globale de l’Ile Seguin, en proposant une réalisation qui devra être conçue à partir du souvenir de la forme générale de l’Ile, compacte, unitaire et en surplomb du fleuve, tel est l’enjeu défini dans cette consultation. L’Ile Seguin est en soi, un lieu unique, un morceau d’architecture flottant sur l’eau, une masse visible en trois dimensions dont l’inaccessibilité actuelle renforce et « exalte » notre imaginaire. Plus qu’une façade de deux kilomètres de long, c’est un paquebot qui s’offre à notre regard, un ouvrage de l’ère industrielle, une masse de métal et de béton qui s’est incrustée dans l’île pour devenir le symbole de la production automobile de Renault. Or, tous ces composants émotionnels vont disparaître pour laisser place à l’île des deux cultures.
La continuité visuelle depuis les rives est importante mais plus encore le serait un parcours. La vue depuis la rue Henri Savignac à Meudon, nous révèle son statut de paquebot abandonné, sa massivité se prolonge par l’idée de traiter ce lieu en épaisseur (et en usage), qui nous incite à traiter cet anneau en épaisseur.
La promenade haute, sorte de visite guidée d’un paquebot devenu imaginaire et qui pourrait se transformer en plaisir vertigineux au-dessus de la cime des arbres, d’un jardin « abandonné », ou en parcours de jogging dans les airs, révélant à tous des vues panoramiques sur les toits de Paris, la Tour Eiffel, Boulogne Billancourt, les jardins de Sèvres et les coteaux de Meudon.
Une trace continue et épaisse au-delà de l’évocation de la masse bâtie et linéaire apporterait à tous le plaisir d’une déambulation ponctuée par des événements reprenant les vestiges de l’île Seguin. Un restaurant abrité par le fronton de la pointe Amont à l’extrémité Est de l’île, une plage au Sud, à l’aplomb de l’ancien débarcadère ou encore un jardin suspendu, en saillie sur le fleuve à l’endroit exact de l’ancienne surélévation à l’Ouest du pont Daydé. Cette promenade se prolongerait en terrasse devant le centre d’art contemporain, permettant une vue frontale sur la fondation. Cette trace aérienne serait relayée par une trace lumineuse et poétique au niveau de l’assise du socle, prolongeant la métaphore. Nous avons choisi de mettre en exergue de cette intervention, un texte évoquant non pas les croisières tranquilles au long des fleuves, mais « le bateau ivre » d’Arthur Rimbaud, qui donne la parole à un navire abandonné par ses occupants et qui dérive au long d’un fleuve.
En effet, lorsque l’usine-bateau Renault en 1992, se trouve fermée abandonnée, vidée, démâtée, pourrait-on dire, c’est la métaphore du bateau dérivant au fil de l’eau, qui s’impose, et la référence au Bateau ivre d’Arthur Rimbaud qui donne la dimension historique et émotionnelle à cette évocation. Nous avons décidé de découper les premières strophes du poème en autant de lettres isolées de grande taille qui, présentées sur des caissons lumineux fixés en partie haute du socle de l’île permettent d’inscrire en une ligne continue de deux kilomètres, ce texte de Rimbaud, sur la promenade
COMME JE DESCENDAIS LES FLEUVES IMPASSIBLES, JE NE ME SENTIS PLUS GUIDÉ PAR LES HALEURS : DES PEAUX – ROUGES CRIARDS LES AVAIENT PRIS POUR CIBLES, LES AYANT CLOUÉS NUS AUX POTEAUX DE COULEURS. J’ETAIS INSOUCIEUX DE TOUS LES EQUIPAGES, PORTEUR DE BLES FLAMANDS OU DE COTONS ANGLAIS. QUAND AVEC MES HALEURS ONT FINI CES TAPAGES, LES FLEUVES M’ONT LAISSE DESCENDRE OU JE VOULAIS. DANS LES CLAPOTEMENTS FURIEUX DES MAREES, MOI, L’AUTRE HIVER, PLUS SOURD QUE LES CERVEAUX D’ENFANTS, JE COURUS ! ET LES PENINSULES DEMARREES, N’ONT PAS SUBI TOHU-BOHUS PLUS TRIOMPHANTS. LA TEMPETE A BENI MES EVEILS MARITIMES. PLUS LEGER QU’UN BOUCHON, J’AI DANSE SUR LES FLOTS QU’ON APPELLE ROULEURS ETERNELS DE VICTIMES, DIX NUITS SANS REGRETTER L’ŒIL NIAIS DES FALOTS ! ….
Date
Concours 2012
Superficie
8 700 m²
Coût
24 000 000 € HT
Mission de base
Mandataire de l’équipe de mâtrise d’œuvre
BFT Architectes
OVE Arup
SNC LAVALIN
Sur cet anneau, viennent s’accrocher ponctuellement, des espaces enveloppés dans des parois translucides qui reprennent les gabarits des différentes surélévations dans lesquelles différentes fonctions sont présentes ; restaurant, serres ou kiosques, qui rythment le parcours du visiteur.
Comme nous l’avons évoqué précédemment, la promenade haute exprimera à la fois, l’épaisseur et la légèreté par sa conception. La masse ajourée de sa structure permettra une lecture frontale transparente et plus dense dans le sens de défilement du fleuve. Sa conception permettra des portées de 50m, sans appui intermédiaire et ce tube transparent sera conçu en référence à des plaques ajourées structurelles assurant un rôle autoporteur.
Cette promenade traversera les airs au-dessus de la cime des arbres, s’encastrera dans les immeubles du Sud de l’île en R+5 ou viendra se poser sur les terrasses. Celle-ci contournera les trois ouvrages que nous conservons, le portail d’entrée du pont Daydé, le fronton de la pointe Amont et également le fronton Nord du point Seibert. Sa forme permettra de gérer plusieurs usages : la promenade le long de la rive, le repos ou la détente surélevée servant de banc linéaire le long du fleuve.
La surélévation du promontoire permettra aussi d’isoler les usagers des bâtiments à l’image des promenades le long des bords de mer en créant des espaces semi-privatifs.
La promenade sera ponctuée par des séquences liées à la mémoire du lieu, un bâtiment créé autour du fronton amont destiné à recevoir un restaurant, un deck sera aménagé en façade Sud, reprenant le thème de Paris Plage, ou encore une serre en surplomb sur le fleuve à l’endroit exact du surplomb existant ou encore au Sud au droit de la terrasse jardin, des kiosques ou buvettes pourraient être aménagés.
© Didier Ghislain
© Didier Ghislain
© Didier Ghislain